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Mercredi 19 Mars

Alioune Diagne révèle un langage visuel unique

Publié le : 28 Février 2025

Par : Hervé Lancelin

Catégorie : Critique d’art

Temps de lecture : 16 minutes

Alioune Diagne transforme l’art contemporain avec son figuro-abstro unique. Ses œuvres, composées de milliers de signes calligraphiques, explorent les réalités sénégalaises tout en évoquant des questions universelles. Un langage visuel qui transcende les frontières culturelles et redéfinit notre perception artistique.

Écoutez-moi bien, bande de snobs. L’art africain contemporain n’est pas un accident de parcours ni une note de bas de page dans l’histoire de l’art mondial. Il est temps de regarder au-delà des clichés et des attentes préfabriquées pour découvrir un créateur d’un langage artistique entièrement nouveau. Je parle d’Alioune Diagne, ce peintre sénégalo-français qui a inventé un mouvement artistique d’une originalité fulgurante : le figuro-abstro.

Les critiques parisiens ont longtemps prétendu être les arbitres ultimes du goût, traînant derrière eux le poids mort de leurs références éculées, incapables de voir ce qui se passe sous leurs nez. Pendant ce temps, Diagne était occupé à créer un alphabet visuel totalement inédit, un système de signes qui transcende les barrières culturelles tout en restant profondément ancré dans son héritage personnel.

Né en 1985 à Fatick, au Sénégal, Diagne a développé son langage visuel unique après avoir été admis aux Beaux-Arts de Dakar en 2008. C’est en 2013 qu’il crée son propre mouvement, ce fameux figuro-abstro, qui consiste à construire une image figurative à partir d’éléments abstraits. Une approche qui ressemble à la poésie concrète, où les mots et les lettres forment des images visuelles tout en conservant leur puissance linguistique. Mais ce n’est pas une simple affaire de forme.

L’essence de cette technique réside dans la tension fascinante entre deux modes de perception : vu de près, on distingue des milliers de signes calligraphiques abstraits ; en prenant du recul, ces signes s’assemblent pour former des images figuratives d’une clarté saisissante. C’est un jeu perpétuel entre le détail et l’ensemble, entre l’abstraction et la figuration, qui rappelle le concept de la “vision oblique” développé par le philosophe Maurice Merleau-Ponty [1].

Merleau-Ponty soutenait que nous ne percevons jamais directement le monde, mais toujours de manière oblique, à travers le prisme de notre corps et de notre conscience incarnée. De même, les œuvres de Diagne nous forcent à ajuster constamment notre perception, à naviguer entre différents niveaux de compréhension, créant ainsi une expérience phénoménologique complexe qui remet en question la stabilité de notre vision.

Les femmes des marchés sénégalais, les pêcheurs confrontés à la surexploitation des ressources maritimes, les migrants risquant leur vie en mer pour atteindre l’Europe – tous ces sujets sont traités à travers le prisme unique du figuro-abstro, offrant non seulement une représentation visuelle, mais aussi une méditation sur la façon dont nous percevons et comprenons ces réalités.

Le travail de Diagne est indissociable de son histoire personnelle. La mort de son grand-père, maître coranique chargé de la reproduction calligraphiée du Coran, en 2013, marque un tournant dans sa pratique artistique. Les heures passées à observer le travail méticuleux de son aïeul ont profondément influencé son approche artistique. Comme l’écrivain Marcel Proust qui plongeait dans les méandres de la mémoire involontaire pour ressusciter le passé, Diagne utilise ses signes abstraits comme un moyen d’invoquer non seulement des images, mais aussi des souvenirs, des émotions et des connexions culturelles profondes.

Si la photographie a été décrite par Roland Barthes comme un “ça-a-été” [2], témoignant d’un moment passé, l’art de Diagne pourrait être considéré comme un “ça-est-toujours”, une présence continue qui refuse la finitude. Ses œuvres sont des témoignages visuels où les couches de signes et de couleurs créent une temporalité complexe, à la fois ancrée dans le présent immédiat de la perception et dans le passé culturel et personnel.

Mais ne vous y fiez pas, son travail va bien au-delà d’une simple expérimentation formelle ou d’une exploration nostalgique. Il y a quelque chose de politique dans son refus des conventions artistiques occidentales, dans sa détermination à créer un vocabulaire visuel qui n’est ni tout à fait africain, ni tout à fait européen, mais résolument singulier.

À l’heure où la galerie Templon à New York s’apprête à accueillir du 6 mars au 1er mai 2025 sa prochaine exposition intitulée “Jokkoo” (qui signifie “connexion” en wolof), Diagne continue d’explorer les liens entre les communautés afro-américaines et africaines continentales, mettant en lumière les similitudes entre ces communautés marquées par des siècles de violence coloniale et en quête d’une nouvelle identité sur la scène internationale.

Lors de la Biennale de Dakar en 2022, certains auraient pu aborder l’événement avec des préjugés préconçus, s’attendant à découvrir un art africain dit “typique” – une notion aussi floue que contestable. Pourtant, l’exposition a confronté le public à une série de tableaux qui l’ont amené à reconsidérer non seulement ses attentes vis-à-vis de l’art africain contemporain, mais aussi sa perception même du rôle et du potentiel de l’art.

Une toile en particulier se distingue : Femmes du marché, issue de la série Scènes de marché. Elle représente un groupe de femmes sénégalaises vêtues de boubous colorés, vendant leurs produits. Mais à mesure que le regard s’attarde, l’image semble se fragmenter en une multitude de signes abstraits, comme si la réalité elle-même se décomposait en ses éléments constitutifs. L’artiste semble ainsi révéler la structure profonde du monde visible, ses atomes visuels, en quelque sorte.

Ce qui est particulièrement intéressant dans l’œuvre de Diagne, c’est la façon dont elle échappe aux tentatives de catégorisation facile. Est-ce de l’art africain ? De l’art contemporain ? De l’art figuratif ou abstrait ? La réponse est à la fois tout cela et rien de cela. Comme l’a écrit le philosophe Jacques Derrida à propos de la déconstruction, l’art de Diagne “n’est pas une analyse ni une critique… [il] n’est pas une méthode et ne peut être transformé en méthode” [3]. Il résiste aux étiquettes simplistes et aux interprétations réductrices. Cette résistance aux catégories préétablies est peut-être la qualité la plus subversive de l’œuvre de Diagne. A notre époque, créer un langage visuel qui refuse d’être facilement assimilé ou classifié est un acte de résistance culturelle.

Le succès croissant de Diagne sur la scène internationale – notamment sa représentation du Sénégal à la 60e Biennale de Venise en 2024 avec le projet “Bokk – Bounds” – témoigne de la puissance et de l’originalité de sa vision. Mais il soulève également des questions importantes sur la façon dont l’art africain contemporain est reçu et interprété par le monde de l’art international.

Trop souvent, les artistes africains sont célébrés uniquement dans la mesure où leur travail correspond aux attentes occidentales de ce que l’art africain “devrait” être – soit authentiquement “traditionnel”, soit ouvertement politique, abordant des questions comme la colonisation, la migration ou l’identité culturelle. Cette dichotomie réductrice nie la complexité et la diversité de l’art africain contemporain, ainsi que la liberté des artistes africains à explorer des préoccupations esthétiques et conceptuelles qui transcendent ces catégories limitées.

Dans ce contexte, l’œuvre de Diagne représente une forme de libération. Son figuro-abstro n’est pas simplement un style visuel distinctif, mais une déclaration d’indépendance artistique, un refus des catégories imposées et des attentes préconçues. Comme l’a observé le critique d’art Okwui Enwezor, “l’art contemporain africain doit être compris comme un champ de pratique qui n’est pas uniquement défini par la géographie ou l’identité culturelle, mais plutôt par une diversité d’approches et de préoccupations qui reflètent la complexité du continent et de ses diasporas” [4].

Les signes calligraphiques de Diagne, qui ne représentent rien de spécifique mais évoquent une multitude d’associations, peuvent être interprétés comme une métaphore de cette diversité et de cette complexité. Comme il l’a lui-même expliqué : “Ces signes sont en fait l’essence de mes tableaux. C’est grâce à eux que l’image devient nette en s’éloignant et qu’elle se décompose en une multitude d’éléments lorsque l’on s’approche… Je les vois comme une écriture remplie d’émotions” [5].

Cette “écriture remplie d’émotions” n’est pas simplement un dispositif formel, mais une manière de communiquer des expériences et des idées qui résistent à l’expression verbale directe. Dans un monde saturé de mots et d’images, où le sens est souvent aplati et homogénéisé, l’art de Diagne offre une forme de communication plus profonde et plus nuancée.

Prenons par exemple son installation “Bokk – Bounds” à la Biennale de Venise, qui comprend une pirogue brisée en deux et enveloppée dans un textile sénégalais peint de ses signes caractéristiques. Cette œuvre puissante évoque les vagues migratoires, les relations fracturées et les séparations que vivent les migrants, ainsi que les futures migrations qui pourraient être provoquées par le changement climatique. Mais elle le fait d’une manière qui évite les pièges du sensationnalisme ou de la simplification excessive.

Au lieu de présenter les migrants comme des victimes passives ou des statistiques anonymes, Diagne insiste sur leur humanité et leur dignité. Comme l’a noté un critique : A travers son travail, “le peintre traite visuellement des problématiques d’aujourd’hui qui le touchent particulièrement comme les migrations clandestines, la diaspora africaine à travers le monde, la place des femmes, l’éducation, la spoliation des ressources en Afrique” [6].

Cette approche rappelle la notion de “témoin” développée par le philosophe Emmanuel Levinas, qui soutient que nous avons une responsabilité éthique fondamentale envers “l’Autre”, une responsabilité qui précède toute connaissance ou compréhension [7]. En nous invitant à témoigner des expériences et des luttes des autres d’une manière qui respecte leur complexité et leur humanité, l’art de Diagne assume une dimension éthique profonde.

Pour sa prochaine exposition à la galerie Templon à New York du 6 mars au 1er mai 2025, Diagne explore les liens entre les communautés afro-américaines et africaines continentales, avec un accent particulier sur la culture sportive. Ses tableaux représentant des joueurs de basket-ball afro-américains et des scènes de lutte sénégalaise – l’un des sports de combat les plus populaires en Afrique – évoquent une identité panafricaine qui transcende les frontières géographiques et historiques.

Comme il l’explique lui-même : “Les jeunes générations en Afrique n’envisagent plus de faire carrière sur leur continent. Leurs regards sont tournés vers le succès de la communauté afro-américaine dans les domaines culturels comme le sport et la musique. Je veux leur montrer qu’il y a un avenir pour eux sur le continent africain. Ils doivent croire et investir dans leurs pays. Il n’y a pas de raison pour qu’il n’y ait pas un rêve africain, comme il y a un rêve américain” [8].

Cette vision d’un “rêve africain” est au cœur du travail de Diagne. Il ne s’agit pas simplement de critiquer les inégalités et les injustices existantes, mais d’imaginer et de contribuer à créer un avenir meilleur. En ce sens, son art est profondément utopique, non pas dans le sens naïf d’une fuite de la réalité, mais dans le sens plus profond d’une imagination critique qui envisage des possibilités alternatives.

La philosophe allemande Ernst Bloch a décrit ce type d’utopisme comme un “principe d’espérance”, une force qui nous permet de voir au-delà des limitations du présent vers un avenir plus juste et plus humain [9]. L’art de Diagne incarne ce principe, non pas en présentant une vision simpliste d’un avenir parfait, mais en créant un espace où différentes possibilités peuvent être imaginées et explorées.

Cette dimension utopique est particulièrement évidente dans son traitement des thèmes de l’éducation et de la transmission culturelle. Comme il l’a déclaré : “Pour moi, les jeunes sont notre avenir, et l’éducation est un sujet qui me tient à cœur… Je souhaite que les jeunes aient accès à l’art et à la culture, même dans les villages du Sénégal. C’est une opportunité que je n’ai pas eue” [10].

Dans ses tableaux représentant des enfants à l’école ou des scènes de transmission de connaissances traditionnelles, Diagne souligne l’importance de l’éducation comme moyen d’autonomisation et de transformation sociale. Mais il le fait d’une manière qui reconnaît la complexité de ces processus et qui respecte la dignité et l’autonomie des personnes impliquées.

L’une des caractéristiques les plus remarquables de l’art de Diagne est sa capacité à aborder des questions sociales et politiques sérieuses sans tomber dans le didactisme ou la simplification excessive. Ses œuvres peuvent être appréciées à de multiples niveaux – comme des explorations formelles captivantes, comme des représentations évocatrices de la vie quotidienne, ou comme des commentaires nuancés sur des questions sociales et politiques plus larges.

Cette multiplicité de lectures possibles est rendue possible par la structure même du figuro-abstro, avec ses couches de signes et ses jeux de perspective. Comme l’a observé un critique : “Par ce nouveau langage, une relation inédite se noue avec le spectateur. Ce dernier est obligé de s’impliquer physiquement, de se déplacer, de plisser les yeux, pour recomposer l’image” [11].

Cette implication active du spectateur est essentielle à l’expérience de l’art de Diagne. En nous obligeant à ajuster constamment notre perspective, à osciller entre différents modes de perception, ses œuvres créent un espace de réflexion et d’engagement critique qui résiste aux interprétations simplistes et aux réponses faciles.

Dans un paysage médiatique dominé par des images et des récits simplifiés qui réduisent souvent des réalités complexes à des clichés facilement digestibles, cette insistance sur la complexité et l’ambiguïté est elle-même un acte politique. Comme l’a écrit la philosophe politique Chantal Mouffe, l’art critique peut jouer un rôle important en subvertissant l’hégémonie dominante et en contribuant à la construction de nouvelles subjectivités [12]. L’art de Diagne est “critique” dans ce sens précis – non pas parce qu’il présente un message politique explicite, mais parce qu’il crée un espace où les certitudes et les hiérarchies existantes peuvent être remises en question et où de nouvelles façons de voir et de comprendre peuvent émerger.

Cette dimension critique est particulièrement évidente dans son traitement de thèmes comme la migration et l’exploitation des ressources. Dans ses tableaux représentant des pêcheurs sénégalais confrontés à la surexploitation des eaux par des flottes de pêche étrangères, ou des jeunes tentant la dangereuse traversée vers l’Europe, Diagne attire l’attention sur des injustices structurelles sans réduire les personnes concernées à de simples victimes.

Comme il l’a expliqué : “À cause de la surexploitation des ressources par les Européens et les Chinois, il n’y a plus de poissons à pêcher. Certains sont devenus passeurs et organisent des ‘voyages maritimes’ pour amener de jeunes Sénégalais, désespérés, en Europe. Diplômés ou non, ces jeunes n’ont pas de travail et sont prêts à risquer leur vie en mer pour gagner l’Europe” [13].

En mettant en lumière ces réalités souvent ignorées, Diagne assume le rôle de témoin et de chroniqueur. Mais il va au-delà du simple témoignage pour créer des œuvres qui invitent à une réflexion plus profonde sur les causes sous-jacentes de ces situations et sur les responsabilités partagées qu’elles impliquent.

Cette approche rappelle la notion de “solidarité réflexive” proposée par la philosophe politique Iris Marion Young, qui soutient que nous avons une responsabilité partagée face aux injustices structurelles, même lorsque nous n’en sommes pas directement responsables [14]. En nous invitant à réfléchir à notre propre implication dans ces structures d’injustice, l’art de Diagne peut contribuer à cultiver ce type de solidarité.

Mais ce qui distingue véritablement le travail de Diagne, c’est qu’il équilibre cette dimension critique avec une célébration authentique de la beauté, de la joie et de la résilience. Ses tableaux ne sont jamais simplement des dénonciations des injustices ou des souffrances ; ils sont aussi des affirmations vibrantes de la dignité humaine et de la richesse culturelle.

Cette double dimension est particulièrement évidente dans ses représentations des femmes sénégalaises. Comme il l’a expliqué : “J’ai remarqué que la plupart des femmes, que ce soit au Sénégal ou en Afrique en général, ce sont elles qui travaillent et s’occupent des enfants en même temps. Et la plupart du temps, les maris restent à la maison, jouent aux cartes ou passent du bon temps. Les femmes se lèvent à 5 heures du matin, elles parcourent les rues de Dakar de marchés en marchés pour y vendre leurs produits comme du poisson, ou des légumes” [15].

En attirant l’attention sur cette réalité souvent négligée, Diagne adopte une position critique vis-à-vis des inégalités de genre. Mais ses représentations des femmes ne se limitent pas à les dépeindre comme des victimes de ces inégalités ; il célèbre également leur force, leur dignité et leur centralité dans la vie sociale et culturelle sénégalaise.

Diagne l’affirme : “Pour moi, les Femmes sont nos héroïnes du quotidien, qui portent à elles seules leur foyer. Je trouve que la société, notamment en Afrique, ne considère pas suffisamment les Femmes. Jour après jour, elles accumulent les tâches et les kilomètres afin de subvenir aux besoins de leur famille” [16].

Cette célébration de la force et de la résilience des femmes est une caractéristique de l’approche plus générale de Diagne, qui cherche à offrir une représentation nuancée et respectueuse des personnes et des communautés qu’il dépeint. Plutôt que de les réduire à des stéréotypes ou à des symboles abstraits, il insiste sur leur individualité et leur dignité.

Cette approche est particulièrement importante dans le contexte des représentations occidentales de l’Afrique, qui ont souvent oscillé entre l’exotisation romantique et la victimisation déshumanisante. Contre ces tendances réductrices, l’art de Diagne offre une vision plus complexe et plus humaine, qui reconnaît à la fois les défis réels auxquels sont confrontées les communautés africaines et leur capacité à y faire face avec créativité et résilience.

Comme l’a écrit la romancière nigériane Chimamanda Ngozi Adichie, “le problème des stéréotypes n’est pas qu’ils sont faux, mais qu’ils sont incomplets. Ils font qu’une seule histoire devient l’unique histoire” [17]. En offrant des représentations nuancées et multidimensionnelles de la vie sénégalaise, l’art de Diagne contribue à contrer ce “danger d’une histoire unique”.

Cette résistance aux simplifications et aux stéréotypes est une caractéristique essentielle de l’approche artistique de Diagne. Comme il l’a expliqué : “J’aime toucher à tout : à la vidéo, à la sculpture, à la peinture, à la photographie, à la sérigraphie. Je vis avec les arts de façon naturelle… Il n’y a pas de barrières” [18].

Cette ouverture aux différentes formes et influences est emblématique de son approche plus large, qui refuse les catégories rigides et les définitions limitatives. Que ce soit dans son traitement des thèmes sociaux et politiques, dans sa fusion innovante de l’abstraction et de la figuration, ou dans sa navigation entre différentes traditions culturelles, Diagne crée un art qui célèbre la complexité et la multiplicité.

C’est peut-être cette célébration de la complexité qui constitue la contribution la plus significative de Diagne à l’art contemporain. Dans un monde de plus en plus marqué par la polarisation et la simplification excessive, son art nous rappelle l’importance de nuancer nos perceptions et nos jugements, de rester ouverts à différentes perspectives et modes de compréhension.

Les signes abstraits qui composent ses images figuratives peuvent être vus comme une métaphore de cette complexité – chaque signe est unique, porteur de sa propre signification et de sa propre émotion, mais c’est ensemble qu’ils créent une image cohérente et significative. De même, c’est en reconnaissant et en valorisant notre diversité et notre individualité que nous pouvons créer des communautés et des sociétés plus humaines et plus justes.

L’art d’Alioune Diagne, avec sa fusion unique de l’abstrait et du figuratif, son engagement critique et sa célébration de la vie, offre non seulement une contribution distinctive à l’histoire de l’art contemporain, mais aussi une vision éthique et esthétique qui peut nous aider à naviguer dans les complexités de notre monde actuel.

Alors, bande de snobs, il est temps d’ouvrir vos yeux et vos esprits. L’art d’Alioune Diagne nous offre bien plus qu’une simple expérience esthétique – il nous invite à reconsidérer nos perceptions, nos préjugés et nos responsabilités, à voir le monde à la fois dans sa complexité détaillée et dans son unité plus large. Comme ses tableaux qui oscillent entre l’abstraction des signes individuels et la cohérence de l’image figurative, son art nous rappelle que nous sommes à la fois des individus uniques et des parties d’un tout plus grand, liés les uns aux autres par des fils invisibles mais essentiels d’histoire, de culture et d’humanité partagée.


  1. Merleau-Ponty, Maurice. “L’Œil et l’Esprit”. Gallimard, Paris, 1964.
  2. Barthes, Roland. “La Chambre Claire : Note sur la photographie”. Éditions du Seuil, Paris, 1980.
  3. Derrida, Jacques. “Lettre à un ami japonais”. Dans “Psyché : Inventions de l’autre”. Galilée, Paris, 1987.
  4. Enwezor, Okwui. “The Short Century: Independence and Liberation Movements in Africa, 1945-1994”. Prestel, Munich, 2001.
  5. Marynet J. Entretien avec The Art Momentum, “Alioune Diagne : Une écriture qui figure l’émotion”, 27 novembre 2019.
  6. Lanot, Lise. “Le peintre Alioune Diagne raconte les histoires de pêcheurs devenus passeurs”. Konbini, 17 janvier 2024.
  7. Levinas, Emmanuel. “Autrement qu’être ou au-delà de l’essence”. Livre de Poche, Paris, 1990.
  8. Diagne, Alioune. Communiqué de presse pour l’exposition “Jokkoo”, Galerie Templon, New York, 14 janvier 2025.
  9. Bloch, Ernst. “Le Principe Espérance”. Gallimard, Paris, 1976.
  10. Diagne, Alioune. Entretien avec Whitewall, 5 juillet 2024.
  11. Les Presses Du Réel. Extrait du catalogue d’exposition “Alioune Diagne : Ndox-Glint”, Musée des Beaux-Arts de Rouen, 2023.
  12. Mouffe, Chantal. “Artistic Activism and Agonistic Spaces”. Art & Research, Vol. 1, No. 2, été 2007.
  13. Rantrua, Sylvie. “Alioune Diagne : Ouvrir la porte aux jeunes artistes sénégalais”. Le Point Afrique, 1 février 2024.
  14. Young, Iris Marion. “Responsibility for Justice”. Oxford University Press, Oxford, 2011.
  15. Marynet J. Entretien avec The Art Momentum, “Alioune Diagne : Une écriture qui figure l’émotion”, 27 novembre 2019.
  16. Diagne, Alioune. Entretien avec OnArt.Media, “A la rencontre de Alioune Diagne, peintre et sculpteur sénégalo-français”, 2020.
  17. Adichie, Chimamanda Ngozi. “The Danger of a Single Story”. TED Talk, juillet 2009.
  18. Forster, Siegfried. “Alioune Diagne, l’art ‘figuro-abstro’ d’un peintre sénégalais”. RFI, 1 novembre 2019.

Référence(s)

Alioune DIAGNE (1985)
Prénom : Alioune
Nom de famille : DIAGNE
Genre : Homme
Nationalité(s) :

  • Sénégal
  • France

Âge : 40 ans (2025)

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